Hyacinthe Westbury {terminé

-A quoi tu penses, Hyacinthe?
-Au fait qu'en mélangeant correctement les deux produits devant moi, je pourrais peut être faire exploser le mur entre ta chambre et la mienne. Un petit loft bien sympa, pendant que j'encourage les parents à te reléguer à la place que les vermines dans ton genre méritent le plus: la cave.
-Tu n'es qu'un crétin...
-C'est toi qui le dis... A ton âge, tu ne crois pas qu'il serait temps que tu quittes la maison?

Un large sourire apparaissant sur ses traits, Hyacinthe avait désormais la certitude, devant l'air offensé de sa sœur aînée, qu'il avait gagné leur petite joute verbale. C'était du moins une joute pour le jeune homme, car comme à son habitude, sa sœur s'était lamentablement laissée faire, et tournait à présent les talons en direction du couloir, bien décidée à mettre le plus de distance possible entre son insupportable cadet et elle.
Se relevant du parquet sur lequel il s'était étalé de tout son long, Hyacinthe ramassa les deux fioles colorées qu'il avait disposé devant lui, et les posa sur sa table de chevet. D'un geste sec, il épousseta ses habits, et sortit d'un air digne de sa chambre. Passant devant la porte ouverte de sa sœur, il ignora le regard haineux qu'elle lui lança, tandis qu'il continuait jusqu'au bout du couloir, tapant trois coups contre la porte à présent face à lui. Elle resta désespérément close. Agacé, Hyacinthe entra sans plus de cérémonie dans la pièce, et jaugea du regard son occupant. Son demi frère cadet, Narcisse, un gosse qu'il aimait sans limites, même s'il s'agissait là du plus insupportable de tous les enfants. Narcisse ne demandait jamais rien, il exigeait. Il avait vite comprit que la défaillance qui avait touché Hyacinthe et sa sœur Eurydice ne pouvait que lui porter profit. Et il avait eu raison. Les deux aînés étaient tombés en disgrâce aux yeux de leur paternel quand, alors que Hyacinthe avait deux ans, leur mère avoua à son époux qu'elle lui avait menti sur son ascendance. Elle n'était pas, comme elle l'avait prétendu jusqu'alors, héritière d'une longue lignée de sang pur, mais avait vu sa branche souillée par le mariage de sa grand mère avec un sorcier né moldu. De ce fait, la famille Westbury se trouvait souillée à son tour. Pendant de longues années, Hyacinthe ne vit jamais son père adresser la parole à sa mère. Si lui savait les motifs de ce silence, les autres sorciers, en revanche, avaient été tenu à l'écart du terrible secret familial qu'était désormais celui des Westbury. Hippolyte Westbury, le père de Hyacinthe, ne délaissa cependant pas ses enfants, aussi impurs qu'ils pouvaient être à présent. Il leur donna une éducation strict, sans vraiment se préoccuper de leur "défaillance". De plus en plus, il fuyait le foyer familial, pour ne pas avoir à supporter la présence de son épouse. Il collectionnait les maîtresses et rentrait tard le soir - du moins quand il rentrait.
Et quelques temps plus tard, alors que Hyacinthe célébrait ses six ans, on retrouva sa mère morte. Une rapide enquête du ministère suggéra une mort accidentelle, mais la vérité ne trompait personne: Hippolyte avait supprimé sa femme pour épouser son ambitieuse maîtresse, Isabella. Une femme horrible, le genre de marâtre qu'on prend immédiatement en grippe. Elle même tenta vainement d'envoyer Hyacinthe en pension, en attendant qu'il rejoigne sa sœur à Poudlard. Mais le jeune lèche botte que Hyacinthe était devenu avait su s'attirer l'affection de son père, et jamais il ne fût contraint de quitter le domicile familial. Bien décidée à imposer son bon vouloir sur la famille Westbury, Isabella multiplia les coups bas pour faire tomber cet affreux gamin qui menaçait sa suprématie. Oui, elle voulait l'argent de son époux, voulait que le prestige de son nom soit désormais sien. Mais les petits bâtards qu'il avait engendré avec sa précédente épouse devaient disparaitre, ou s'en était fini de ses plans si parfaits.

L'aînée des bâtards, Eurydice, ne posa aucun problème. Elle ressemblait en tout point à sa défunte mère, et avait su s'attirer le désintéressement de son père. Profitant de la situation, Hyacinthe s'était toujours cru tout permis avec sa sœur, qu'il ne manquait pas de rabaisser. Son sang était aussi impur que celui d'Eurydice, mais pour Hyacinthe, c'était un fait sans importance. Il aimait se moquer d'elle parce qu'elle était une cible facile. Contrairement à lui, Eurydice laissait en permanence entrevoir ses failles, et représentait la victime idéale pour les petites moqueries de son frère. Si lui gardait la tête haute quoi qu'il advienne, on ne pouvait pas en dire autant de sa sœur. Les deux enfants n'étaient jamais solidaires, pas même lorsqu'il s'agissait d'affronter leur terrible belle mère. Dans le domaine du chacun pour soi, Hyacinthe excellait.
Isabella finit par baisser les bras devant l'énergie que déployait son beau fils à rester dans les bonnes grâces de son père. Il n'y avait rien à faire, le cadet était le préféré, et savait profiter de son père quand il le fallait. La haine entre Hyacinthe et sa belle mère était palpable, mais chacun fermait les yeux pour sauver les apparences.



-Dis Cendrillon, comment va ton affreuse belle mère?
-Elle respire encore, hélas...

Cendrillon, voyez par là Hyacinthe, prénom qui n'est certes pas beaucoup plus viril, allait sur ses dix ans, tandis que le ventre de sa belle mère s'arrondissait à vu d'œil. Oui, la mégère avait enfin trouvé le moyen de reléguer Hyacinthe à la seconde place. Offrir un héritier de sang pur à son époux ne pourrait que le mettre en joie, se disait Isabella. Et en effet, elle avait raison. Savoir que sa descendance ne serait pas ruinée par des sang impurs plongea Hippolyte dans une euphorie sans pareil, tandis qu'Isabella se pavanait devant Hyacinthe, le ventre sortit pour lui montrer que bientôt, le petit bâtard aurait la place qu'il méritait. Hippolyte n'aimait pas moins ses deux enfants ainés, mais la perspective d'avoir un enfant de sang pur était tout de même plus appréciable. Hyacinthe n'eut pas vraiment le temps de s'occuper des remarques stupides que lui infligeait sa belle mère. Il avait trouvé une activité plus louable: l'hypocrisie. Pas avec Isabella, bien sûr, il préférait mille fois la voir brûler en Enfer. Mais avec son père, qui l'emmenait à présent partout avec lui, désireux de montrer ce fils qui se montrait si serviable et polie. Oui, Hyacinthe avait décidé de s'exhiber devant les amis de son père, et de faire en sorte qu'on ne tarisse pas d'éloge sur lui. Le but de son petit manège était de passer pour le fils parfait, et de rendre Isabella folle de rage. Ce qui ne manqua pas d'arriver. Il la plongea dans un tel état de stress qu'on fut contraint de l'aliter pendant les derniers mois de sa grossesse, et elle accoucha avec plusieurs semaines d'avance.
Malheureusement pour Hyacinthe, la belle mère avait la vie dure, et survécut à son accouchement pourtant bien périlleux. Comme pour Eurypide et Hyacinthe, on nomma le nouveau venu d'une manière peu conventionnelle, et on emprunta un nom directement sorti des mythes antiques: Narcisse. Un petit garçon choyé par son horrible mère, et traité comme un prince, qu'il n'était pourtant pas. Hyacinthe était bien décidé à tout mettre en œuvre pour se faire apprécier de son frère, dans le but inavoué d'agacer sa belle mère. Mais c'était sans compter sur un évènement que Hyacinthe avait complètement oublié, à cause des derniers évènements. A savoir son entrée à Poudlard. Un an à peine après la naissance de Narcisse.

-Je pense que cette année va être la meilleure de toutes... Moi et mon petit ami, on est dans l'équipe de Quidditch!
-S'il a un peu de bon sens, il te fera tomber de ton balai au prochain match.
-PAPA!
-Ouais, t'as raison. S'il avait du bon sens, il ne trainerait pas avec toi. Et puis, ferme là, si ta vie nous intéresse un jour, on te fera signe.

Discussion close. De toute façon, leur paternel était entré dans la pièce, alerté par le cri d'Eurydice. Et s'il y avait bien une chose dont il ne voulait pas entendre parler, c'était bien des petites disputes que ses enfants entretenaient constamment. Leur famille n'était pas un modèle d'union, mais sauver les apparences étaient primordial aux yeux d'Hippolyte. Isabella elle même le rejoignait sur ce point. La maternité semblait d'ailleurs l'avoir attendri. Depuis la naissance de Narcisse, la guerre s'était atténuée, les remarques acerbes laissaient place à des regards froids. Mais Hyacinthe n'oubliait pas la garce qu'elle restait au delà des apparences, et attendait patiemment la reprise des hostilités.
Quoiqu'il en soit, le jour était venu de se rendre ensemble, tel une belle famille unie, jusqu'à la gare de King's Cross, où Eurydice et son frère entreraient à Poudlard. Tout le long du trajet, Hyacinthe demanda maintes et maintes fois à son père s'il était comme sa sœur. La réponse, chaque fois, était négative, et c'est d'un air triomphant, juste avant de dire au revoir à ses parents, qu'il décréta: "Voilà au moins une bonne nouvelle. Ne pas l'avoir sur le dos pendant les deux ans qui lui restent ici. Si nous sommes si différents, aucun risque qu'on soit dans la même maison, pas vrai?". Sûr de lui, le jeune garçon n'attendit pas de réponse. D'un geste très digne, il serra la main de son père, adressa un bref signe de tête à une Isabella ravie de se débarrasser de Hyacinthe, et monta à bord du train. "Hyacinthe? Hyacinthe Westbury?" "Ne faîtes pas cette tête là, vous vous attendiez à quoi? Hyacinthe est un prénom de garçon, pour votre information." Jetant un regard noir au professeur qui venait d'appeler son nom dans la salle de cours, il rajouta un bref "présent" à la fin de sa phrase. Les gens étaient tous aussi stupide que le professeur dégarni qui lui faisait face? Bon sang, pour une première semaine à Poudlard, on ne pouvait pas rencontrer d'élève plus blasé que le jeune Westbury. Il s'était fait coller pour avoir essayé un sort sur un camarade, avait été à la rencontre de son directeur de maison après avoir rabroué quelques elfes de maison pas assez obéissant à son gout, et on ne sait combien d'autres incartades qui lui avaient valu des ennuis de plus ou moins grande importance.

Le petit emmerdeur qu'était devenu Hyacinthe au fil des années avait également appris à manier la subtilité. Il ne fonçait pas tête baissée quelque part, et se montrait particulièrement rusé quand il s'agissait d'obtenir quelque chose à son avantage. Le reste du temps, quand il se fichait bien de ce qu'on pouvait penser de lui, il se montrait acerbe et désagréable, bien décidé à s'amuser au détriment des autres. S'il y a bien une chose qu'on savait chez Hyacinthe, c'est qu'il n'avait aucune limite. Il n'avait pas un physique d'armoire à glace, ne se passionnait pas pour le Quidditch, lui préférant les jeux de réflexions comme les échecs. Il n'hésitait pas à se mesurer à plus fort que lui, jouait des coudes pour tout et rien, s'incrustait dans les conversations sans la moindre gêne, et lançait des défis stupides à ceux qui l'entouraient. Hyacinthe se donnait des airs de garçon sûr de lui, ce qu'il était sans aucun doute, mais restait malgré tout un con. Il n'y avait pas d'autres mots pour celui qui avait fait de l'impertinence sa règle de conduite, et l'hypocrisie son cheval de Troie.
Les années passèrent, et rien de bien spectaculaire ne vint troubler ses études. La fin des études de sa sœur fut pour lui l'occasion de déboucher le champagne, à présent, il était le seul Westbury à profiter des grands couloirs de Poudlard. Et à la différence d'Eurydice, il comptait bien y laisser un souvenir mémorable. Sombrer dans l'oubli? Certainement pas, Hyacinthe Westbury était une personne qui laissait sa marque. Une personne inoubliable.
Hyacinthe était donc un petit con, aux tendances égocentriques non dissimulées, et qui se souciait peu du regard des autres. Passé cette description, il n'y avait plus grand chose à en dire. Il avait une tendance à lever le coude et boire à l'excès qui ne différenciait pas vraiment des jeunes de son âge. Il avait passé ses examens, lors de sa cinquième année, en se moquant pas mal des résultats.

...

Hyacinthe alla s'asseoir sur le lit de Narcisse. Après s'être installé d'une manière confortable, il fit signe à son frère de le rejoindre. Dans un murmure, il glissa quelques mots à son cadet.
-Tu vois, Narcisse, la pauvre fille qui occupe la chambre, là bas? Je te confie la tâche de lui pourrir la vie. Et si tu pouvais en faire autant avec ta mère... Tu sais, entre homme, il faut se serrer les coudes!
Son frère hocha la tête, tandis que Hyacinthe affichait un air satisfait. La relève était assurée, ici, il pouvait partir sans crainte pour Poudlard, à l'assaut de la sixième année.